Légendes au sujet des Templiers
La fin de l'Ordre des Templiers (1307-1314) a généré de nombreuses légendes au sujet des Templiers. Elles sont apparues essentiellement à partir
du XVIII EME siècle, en particulier dans les milieux maconniques, qui vont voir en eux le maillon avec les bâtisseurs mythiques du Temple de Salomon. Ces légendes se sont
développées et portent généralement sur la survivance secrète de l'ordre et la nature d'un mystérieux trésor, source de leur richesse et de leur puissance, ce trésor étant souvent lié à la
légende du Graal. Elles sont très répandues dans la littérature ésotérique, qu'il s'agisse de fictions ou de spéculations, et ont récemment connu un regain d'intérêt en raison de livres à
succès comme le Da Vinci Code.
Les origines des légendes
Un certain nombre d'aspect de l'histoire de l'Ordre du Temple sont à l'origine des nombreuses légendes apparues à son sujet :
- La puissance, la richesse et l'influence de l'ordre
- Sa fin tragique et soudaine
- Les accusations d'hérésie, d'idôlatrie et de sodomie portées lors du procès, et "confirmées" par les aveux obtenus sous la torture.
Avant le XVIII eme siècle
Entre la chute des Templiers et le XVIII eme siècle, se développent deux idées assez contradictoires : celle de l'innocence de l'Ordre vis à vis
des accusations qui avaient été portées contre lui et "confirmées" par les aveux obtenus sous la torture (par exemple dans l'Histoire de l'ordre militaire des Templiers de l'archiviste
et bibliothécaire Pierre Dupuy (1582-1651)), et celle d'un ésotérisme templier (idée dont on trouve la trace dans le De occulta philosophia (1531) du médecin alchimiste Cornélius
Agrippa.
La franc-maçonnerie templière au XVIII eme siècle
Les premières
loges maçonniques apparaissent au XVII eme siècle, en Écosse et en Angleterre, et se répandent en Europe dans la première moitié du XVIII eme
siècle. Elles se réclament d'une origine ancienne, remontant aux origines supposées des "loges opératives" (c'est-à-dire de véritables artisans
maçons), ainsi qu'aux origines de l'art de bâtir lui-même et donc, dans un environnement profondément marqué par le christianisme, au mythe biblique de la construction du Temple de
Salomon.
Vers 1725, apparaît à Londres le troisième grade de la franc-maçonnerie. Sa légende fait de l'artisan bronzier Hiram, mentionné dans la Bible, l'architecte de ce chantier. En 1736, dans son fameux discours, le chevalier de Ramsay, (1686-1743) rattache la Franc-Maçonnerie aux croisés, et plus spécifiquement aux Chevaliers de Saint Jean de Jérusalem, mais pas aux Templiers.
Dans les années 1740 apparaissent en France de très nombreux nouveaux grades maçonniques, nommés hauts grades maçonniques. L'un des plus anciens d'entre eux, dénommé « Chevalier d'Orient et de l'Épée », développe sa légende symbolique propre sur le thème de la reconstruction du Temple de Jérusalem au retour de la captivité de Babylone. Il fait des chefs hébreux de cette époque des chevaliers-maçons, qui arborent dans l'iconographie symbolique du grade la truelle du maçon dans une main et l'épée du chevalier dans l'autre. Ce grade connut un grand succès en France puisqu'il y eut dans les années 1750 plusieurs loges de « Chevaliers d'Orient » dans la seule ville de Paris et qu'il devint le grade terminal de plusieurs systèmes maçonniques dans les années 1760. La légende de ce grade n'évoque cependant pas les chevaliers du l'Ordre du Temple, mais seulement des chevaliers-maçons qui reconstruisent le Temple de Jérusalem.
Dans cette première moitié du XVIII eme siècle, en Allemagne, apparaissent des cercles alchimistes, sous le nom générique de Rose-Croix d'Or, et
reliés entre eux par une doctrine assez floue, plus ou moins inspirée des mystérieux manifestes Rose Croix du siècle précédent (1614 et 1615). Sans être à proprement parler maçonniques, ces
cercles sont en relation avec les loges. C'est probablement dans ces milieux qu'apparaît l'idée de l'origine templière de la franc-maçonnerie, reliant la chevalerie de Ramsay au Temple d'Hiram.
Elle s'est propagée dans les milieux maçonniques allemands et protestants, alors que le pape Clèment XII s'était élevé contre la franc-maçonnerie dans la bulle In eminenti (1738).
Le plus ancien écrit connu est un manuscrit maçonnique de 1760 trouvé à Strasbourg, qui relie Templiers, Rose-Croix et Francs-Maçons dans une tradition immémoriale d'une société secrète, hermétiste et occultiste. Un autre manuscrit, hongrois, les associent en 1761 aux Argonautes.
Mais c'est surtout la Stricte Observance Templière du baron von Hund (1722-1776) qui va populariser l'idée au sein de la franc-maçonnerie, ainsi que
dans les hauts grades hauts grades maçonniques . La première légende de survivance de l'ordre prend forme : Pierre d'Aumont, précepteur d'Auvergne et quelques compagnons (le nombre
varie) trouvent refuge en Écosse, sur l'Ile de Mull, auprès des "Chevaliers de Saint-André du Chardon". Ils participent à la bataille de Bannockburn en 1314 avec le roi Robert de
Bruce. Cette légende permet de relier les Templiers avec les origines écossaises de la Franc-Maçonnerie, la plus ancienne loge connue, celle de Mary's Chapel, étant fondée en 1599 par
William de Saint Clair. Le caractère historique de la filiation templière fut cependant rejeté lors d'une assemblée générale
maçonnique de Wilhelmsbad en 1782, pour devenir "symbolique" et "spirituel" au sein du Rite Ecossais Rectifié fondé par le lyonnais Jean Batiptiste
Willermoz.
Dès lors, les groupes "néo-templiers" se développeront en marge de la franc-maçonnerie.